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Les beignets de Carnaval de Corcieux en Lorraine

Beignet de Carnaval (Crédits photo : Destination Lorraine)

La veille du Mardi Gras, c’était la mode, dans chaque ménage, on faisait des beignets de Carnaval. Chaque femme avait sa spécialité pour qu’ils soient meilleurs et craquants. Dans un saladier, Rosalie écrasait trois œufs bien frais qu’elle débattait avec du sucre, de la crème et ce qu’il fallait de farine blanche. Pour donner plus de goût à la pâte, elle y mettait un demi-verre d’eau-de-vie, du kirsch, du rhum, ou bien de la prune, selon ce qu’elle avait sous la main. Bien sûr, elle n’oubliait pas la levure pour faire gonfler cette migaine-là.

Il fallait tout étendre, bien ressuyer sur la table de la cuisine, comme pour une tarte. Rosalie ne ménageait pas sa peine. Il faut ce qu’il faut ! Avec un litre vide, elle faisait une pâte fine.

Puis, elle commençait à découper les beignets de Carnaval avec un couteau. Elle en faisait de toutes les façons : des ronds, avec un verre, des pointus, des tressés, des fendus … Dans la graisse chauffée, dans la poêle, les beignets de Carnaval cuisaient. C’étaient du saindoux, ou bien de l’huile, parfois de la végétaline achetée chez l’épicier.

Il fallait surveiller la cuisson pour ne pas les brûler. Ils devaient rester bien rôtis, bien croustillants. Rosalie les retirait sur un plat après qu’ils étaient égouttés sur une fourchette. De nouveau, elle y remettait des morceaux de sucre qu’elle avait broyé avec son litre sur un papier.

Les enfants étaient déjà là pour bâfrer les premiers. « Cessez de vous empiffrer », criait Rosalie, il faut en laisser pour ce soir à la veillée, et pour midi, avec le café ! Un peu lourds étaient ces beignets de Carnaval. Ce qu’on fait à la maison pesse toujours sur l’estomac.

***

Les culs r’veuhhés

Lè waille di mMwâdi Grâs, ç’tait lè meûde, dos chèque mènêge, o fèyit des culs r’veuhhés. Chèque fomme ovoût sè spèciâlitè po qu’is sint meutes et co craquants. Dos în salardî, lè ’Zalîe frachit trâs û(f)s bé frahhs qu’elle deusbettait èvo di seuke, dè crème et çu que follait de bianche fèrîne. Po beilli pus d’got è lè pâte, elle y botait în demèy-voûrre de brand’vîn, di kirsch, di rhum, ou bè dè prine, s’lon ç’qu’elle ovoût zos lè main. Bè sûr, elle ne reubriait mi lè l’vûre po fâre gonfiè lè migaine-lo.

Follait stonde lo tout’, bé r’hhouè sus lè tâye de lè keuhine, comme po ène tâte. Lè ’Zalîe n’mènègit mi sè pône. Faut ç’que faut ! Èvo în lite veuyde, elle fèyit ène fine pâte.

Peus, elle ecc’mmoçait è dèkeupè les culs r’veuhhés èvo în couté. Elle è fèyit de totes les foçons : des ronds, èvo în voûrre, des piquants, des nettès, des fondus … Dos lè graihhe hhauffîe, dos lè pêle, les culs r’vehhés keuhint. Ç’tait di ru, ou bé d’l’(h)ôle, des foûs dè vègètaline èch’tâye chîz l’èpicî.

Follait surwailli lè keuhon po n’mi lès breulè. Is d’wint d’mourè bè reustis, bè freusiants. ’Zalîe les r’tîrit sus în pièt èprès qu’is ’tint zgottîs sus ène fourchotte. De novè, elle y r’botait des mions d’seuke qu’elle ovoût brayi èvo so lite sus în pôpî.

Les râces ’tînt ’jo lo po brafè les premèys. « Heûtez-vos d’vos gossè », que bwêlait lè ’Zalîe, faut è laihhi po lo sâ-ci ês loûres, et co po midi, èvo lo cafè ! Ène ’caille pesants, les culs r’veuhhés. Cu qu’o fât è lè mâhon pesse tocoûs sus l’estomèc.

Traduction du Patois de Corcieux de Pierre Fève.

Pierre Fève était un instituteur de Corcieux. Il avait publié en 1971 dans les Bulletins de la Société Philomatique Vosgienne un dictionnaire thématique patois-français ainsi qu’une grammaire. Il écrivait également des histoires en patois dans les Annonces des Hautes-Vosges.

Rédigé par André TOUCHET

Amoureux des langues régionales et de la Lorraine pour le Groupe BLE Lorraine.

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2 Commentaires

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  1. Les corvechets sont une spécialité confectionnée en Lorraine à l’occasion du Carnaval. Egalement appelés « cornates » ou « cornies », ils peuvent se traduire par « petites cornes ». Ces petits baignés pointus sont préparés selon les préférences avec de la levure pour un aspect moelleux ou sans pour une texture plus sèche. Ils étaient traditionnellement servis lors du dernier festin avant le jeûne de quarante jours. De manière générale, les familles lorraines cuisinaient durant cette période des desserts composés de beurre, d’œufs ou de lait … soient autant d’ingrédients périssables et interdits pendant le Carême.

  2. 3 elle y mettait un demi-verre d’eau-de-vie, du kirsch, du rhum, ou bien de la prune, selon ce qu’elle avait sous la main »
    ERREUR ! La mirabelle avait le dessus ! ! !

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