Les Vosges sont principalement connues pour leurs sommets et leurs chaumes. Le sommet le plus connu en Lorraine est d’ailleurs le Hohneck avec ses 1 363 mètres d’altitude. Pour les plus avertis, la plaine Vosgienne et notamment celle de Mirecourt renferme d’étonnant secrets allant de la dentelle jusqu’à l’art de la lutherie. Pour les plus esthètes se sont davantage les images d’Epinal, célèbres dans le monde entier grâce au génie créatif de l’illustrateur Jean-Charles Pellerin (1756-1836), qui peuvent être mises en avant. Cependant, la géographie vosgienne comporte un troisième paysage qui vient de ce fait agrémenter son histoire. Celui-ci se situe entre les hauteurs et la plaine et constitue en quelque sorte un piémont timide et oublié. Il s’agit de la Vôge.
L’étymologie de la Vôge vient sans doute du monde celte. Ces anciennes tribus, dont les traces demeurent encore aux abords de Saint-Dié-des-Vosges sur le site dit du Massif de la Bure, ont longtemps eu pour dieu Vosegus ou Vogesus. Déjà, à l’époque, l’étendue de forêt et la population étaient placées sous la protection de cette divinité tellurique représentant la nature et la chasse. Plus tard, lorsque César écrivit son fameux ouvrage La Guerre des Gaules et que ce territoire fut romanisé, il garda le nom de Vosegus pour désigner cette fois-ci l’ensemble du massif forestier s’étendant de Langres jusqu’à aux Hautes-Vosges. Ce n’est qu’après une longue évolution que progressivement la Vôge émergea comme un territoire à part entière. Son espace s’étend ainsi d’Ouest en Est sur une trentaine de kilomètres du Pays de Darney aux environs de La Vôge-les-Bains et de Xertigny.

La Vôge se distingue par un relief doux, des collines verdoyantes, parsemées de prairies et de forêts de hêtres, de chênes et de sapins. Leur altitude décroît du Nord-Est au Sud-Est. A titre d’exemple, Xertigny se situe à 496 mètres d’altitude, le Clerjus à 400 mètres d’altitude et La Vôge-les-Bains, qui regroupe les trois communes de Bains-les-Bains, d’Harsault et d’Hautmougey, à 313 mètres d’altitude. Plus à l’Ouest, Darney se trouve à 270 mètres d’altitude et Bleurville à 280 mètres d’altitude. Située non loin du grand château d’eau que représente le territoire de Langres, une multitude de rivières comme la Saône, le Côney, la Semouse, le Madon ou encore la Combeauté y serpentent paisiblement.

Historiquement, la Vôge est intimement liée à celle de la Lorraine. Son histoire est ainsi marquée par les invasions et les reconstructions. Au Moyen-âge, les Ducs de Lorraine y possédaient un château à Darney, ville qui était surnommée la « cité aux trente tours », mais aussi à Fontenoy-le-Château. Ce dernier était bâti sur un éperon rocheux pour défendre la Vallée du Côney. Préservé par l’association des Amis du Vieux Fontenoy, le donjon de ce château serait parmi les plus anciens de Lorraine. Plus tard, en 1865, le jeune Haut-Marnais Victor Champion arriva à Xertigny et y fonda la brasserie « La Lorraine ». Ce fut alors le début d’une tradition brassicole très appréciée. Les activités agricoles poursuivirent leur développement durant la Belle Epoque. Dans la Vôge, les récoltes des champs sont généreuses en avoine, en seigle et en pommes de terre. La réputation des féculeries s’établit avec renom, à l’image de celle encore existante du Moulin Gentrey à La Vôge-les-Bains. Néanmoins, c’est bien l’économie de la forêt qui domine encore le plus à travers notamment ses chênaies et hêtraies. Celle-ci a par ailleurs participé à l’essor d’autres industries comme celles du verre, des couverts et de la métallurgie avec par exemple la ferblanterie de la Manufacture royale de Bains-les-Bains.

A noter enfin que le thermalisme est aussi présent dans la Vôge depuis la découverte de sources d’eaux chaudes par les Romains à Bains-les-Bains et à Plombières-les-Bains. Joliment nommée « ville aux mille balcons », la cité thermale de Plombières reste encore assez méconnue malgré son architecture unique. Beaumarchais y fit pourtant jouer la toute première représentation du Mariage de Figaro. Stanislas, Montaigne, Voltaire, l’Impératrice Joséphine de Beauharnais, Berlioz, Lamartine, Alfred de Musset, Goya ou encore Poelvoorde y trouvèrent également un charme irrésistible. Plombières-les-Bains représente ainsi bien la quiétude si caractéristique de ce territoire oublié mais pluriel que l’on nomme la Vôge.

