Kévin GOEURIOT
Les évangélistes sont assez laconiques au sujet de Saint Joseph. Matthieu nous apprend seulement qu’il était issu de la lignée du Roi David et qu’il reçut en songe la visite d’un ange qui l’aurait sommé de ne pas répudier Marie et d’élever Jésus. Marc ne le cite même pas. Luc rappelle brièvement que la Vierge Marie était fiancée à un homme du nom de Joseph et qu’il conduisit son épouse jusque Bethléem. Jean enfin, n’évoquant pas la naissance du Christ, élude totalement le nom de Joseph.
Pour autant, Saint Joseph s’est vite imposé comme une figure clé du christianisme. Symbole de fidélité à l’épouse et en même temps modèle du père dévoué, il incarne depuis longtemps l’image, voire l’archétype de l’amant et du patriarche. En outre, la profession qu’il était censée exercée l’a très vite désigné comme étant le patron des chaisiers, des menuisiers et des charpentiers. Ces derniers continuent d’ailleurs de lui vouer un certain culte et on ne compte pas le nombre de chapelles dédiées à Saint Joseph dans notre région.
A la Bresse par exemple, la jolie petite chapelle dite du Brabant renferme une statue du saint à laquelle les habitants avaient autrefois associée un rituel étonnant. Voulaient-ils en effet savoir si un parent allaient survivre à une maladie qu’ils allaient déposer sur le dos de la statue une chemise du souffreteux. Si la chemise restait en place le temps de la récitation du chapelet, le malade était assuré de guérison. Dans le cas contraire, le pire pouvait être craint. Ceux qui n’avaient pas pu se procurer de chemise pouvaient encore brûler, au pied de la même statue, trois cierges censés incarner Saint Vit, Saint Languit et Saint Maur. La première bougie qui s’éteignait annonçait le sort futur du malade. Ainsi pouvait-il vivre, se languir ou mourir.
Invoqué par les charpentiers et contre les maladies, Saint Joseph faisait également l’objet d’actives prières de la part des jeunes filles désireuses de se marier. Rien d’étonnant à cela, quand on sait que Joseph fut l’époux de la plus célèbre des mères. Nos ancêtres lorrains ne croyaient-ils pas, d’ailleurs, que les moineaux se mariaient le jour de la Saint Joseph ? A Foulcrey, la chapelle Saint Joseph renferme une pierre qui, si on marche dessus, assurerait le mariage dans l’année. Et l’on sait aussi que les bâcelles d’entre Meuse et Vosges récitaient jadis cette touchante prière :
« Grand Saint Joseph, puisque les bons mariages se font au ciel, je vous conjure par le bonheur incomparable que vous reçûtes, lorsque vous fûtes fait le vrai légitime époux de Marie, de m’aider à trouver un parti favorable (ou une compagne fidèle), avec la grâce que je puisse aimer et servir Dieu à jamais. »
Fixée au 19 mars, la fête de la Saint-Joseph marque également un repère dans le calendrier paysan. Elle correspond à peu près au retour des beaux jours et à l’arrivée du printemps. Aussi, les anciens avaient-ils fait de la Saint-Joseph une date propice pour semer pommes de terre, pois, fèves et oignons. Au sujet de ces derniers, le Docteur Raphaël de Westphalen nous rapporte un savoureux dicton que voici : « Sème tes oignons à la Saint Joseph ; ils deviendront gros comme tes fesses. » Dicton approximatif. Car comme chacun sait, certaines fesses sont plus grosses que d’autres.
