Pendant des siècles, le loup fut un animal très redouté. Car, si ce prédateur s’attaquait souvent aux troupeaux de bétail des villageois pour se nourrir, il pouvait parfois se montrer menaçant voire très agressif envers les humains. Un document d’archives rappelle qu’une chasse aux loups a été organisée à Prény au Siècle des Lumières pour éradiquer l’espèce de la commune.
L’historien Jean-Marc Moriceau, spécialiste de ce sujet, a recensé plus de 3 000 attaques sur l’homme en France du XVème au XXème siècle dans son ouvrage Histoire du méchant loup paru en 2007. Ce dernier a distingué deux types d’attaque. Celles dues à un loup victime de la maladie de la rage sont de loin les plus nombreuses. Rendue folle par la déshydratation provoquée par une phobie de l’eau, la bête s’attaquait à toute créature croisant son chemin. La morsure par un animal enragé était alors funeste, entraînant inévitablement la mort. Il faudra attendre les travaux de Pasteur à la fin du XIXème siècle pour libérer l’humanité de ce fléau.

Cependant, certains spécimens de l’espèce canis lupus appréciaient particulièrement la chair humaine. Ils avaient eu l’occasion de la goûter en visitant les champs de bataille si nombreux au cours du XVIIème siècle en Europe. Opportunistes, ils profitaient de la grande quantité de viande offerte par les nombreux cadavres jonchant le sol. Ayant pris goût à cette nourriture, ils pouvaient alors se transformer en de redoutables prédateurs pour l’espèce humaine. Toutefois, l’animal étant très intelligent, il évitait généralement de s’attaquer directement à un homme mûr, capable de se défendre et même de le tuer. Suivant son instinct naturel, le loup lorgnait sur des proies plus faibles ou plus petites que lui, principalement des enfants, mais aussi des femmes, des vieillards ou encore des personnes souffrant d’infirmités. Afin de faire disparaître ce danger, une loi fut votée le 3 août 1882, sous la IIIème République. Répondant aux vœux émis à plusieurs reprises par la Société des Agriculteurs de France, elle eut pour conséquence l’éradication totale du prédateur sur le territoire français.
Une ordonnance d’Antoine-Martin de Chaumont, Marquis de la Galaizière, intendant de la Lorraine de 1737 à 1768, est conservée aux Archives départementales de Meurthe-et-Moselle sous la référence C 450. Rédigée le 23 janvier 1742, elle ordonnait à la communauté villageoise de Prény de mobiliser la moitié de ses membres, constituée des meilleurs tireurs, pour participer à une battue aux loups le 3 février 1742. Face aux ravages causés par ces prédateurs qui s’en étaient pris au bétail, mais aussi à des personnes, les traqueurs désignés devaient se rendre le jour dit, de tôt matin, au dépôt de Montauville, afin de s’équiper en poudre et chevrotine.

Nous n’avons pas trouvé de rapport rendant compte du résultat de cette chasse. Mais ce fut sans doute un véritable carnage, même si le loup ne fut pas complétement exterminé. En effet, en novembre 1883, une louve fut encore tuée à Prény. Subsiste un nom de lieu-dit, tout proche du village de Prény, mais situé sur le ban de Pagny-sur-Moselle. La Côte de Huleloup rappelle l’époque lointaine pendant laquelle les bourgeois de Prény, blottis la nuit derrière leurs murailles fermées par de solides portes, entendaient s’élever de cette côte boisée les lugubres et glaçants hurlements de la bête.
