Kévin GOEURIOT
Situé à quelques kilomètres au Sud-Ouest de Courcelles-Chaussy, le château de Pange est l’un des plus élégants du Pays Messin.
Construite en contrebas de l’église locale, la demeure domine la rive gauche de la Nied française. C’est un bâtiment de plan rectangulaire, coiffé d’un toit d’ardoise à la Mansart et garni de deux petits pavillons en demi-hors-œuvre sur les côtés de la façade qui donne sur la rivière. Une façade qui n’aligne pas moins de trois niveaux de sept travées de fenêtres, en comptant celles des combles, et qui reste animée par des bandeaux et des chaînages d’angle en pierre de Jaumont particulièrement soignés. Chaque pavillon affiche quant à lui trois niveaux de trois fenêtres, encore que le brisis du toit n’offre ici qu’une lucarne encadrée de deux petits oculi. La façade qui est tournée vers le village aligne quant à elle neuf travées de fenêtres réparties sur trois niveaux, en comptant les lucarnes des combles. Elle est parfaitement symétrique et un avant-corps central, surmonté d’un fronton triangulaire au centre duquel a été installé un cadran d’horloge l’anime tout en lui donnant une relative austérité. La clé de voûte qui surmonte la porte d’entrée, sculptée aux armes de la famille de Pange, est en effet le seul élément de décor de cette imposante façade. A l’intérieur, le visiteur remarquera, dans l’entrée, un magnifique escalier à trois volées droites et orné d’une rampe en fer forgé particulièrement élégante. Quelques pièces lambrissées et meublées avec goût, tout comme les jardins, particulièrement soignés, font du château de Pange l’un des sites les plus remarquables du Pays Messin.
Un site dont on connaît assez bien l’histoire. On sait en effet qu’un premier château existait à Pange, au Moyen-âge. Détruit en 1404 par les soldats du Comte de Nassau-Sarrebruck, il est reconstruit dans le courant du XVème siècle. Au siècle suivant, la seigneurie de Pange appartient aux Beauvau, puis aux de Vapy. En 1704, un incendie ravage la toiture du château. Les travaux de reconstruction, particulièrement coûteux, décideront peut-être le propriétaire à céder la demeure à Jean-Baptiste-Louis Thomas de Pange, alors trésorier des troupes du roi au département de Metz. De 1720 jusqu’en 1756, il s’applique donc à faire reconstruire le château. A l’emplacement de l’ancienne demeure de laquelle il subsiste cependant quelques vestiges, c’est donc un nouveau château qui sort de terre. Les travaux sont confiés à un certain Jean Louis, architecte qui œuvre par ailleurs au chapitre de la cathédrale de Metz. C’est lui qui ajoute les pavillons sur la façade côté Nied. En 1807, les deux tours qui flanquaient l’entrée de la cour d’honneur et qui servaient de cachot et de dépôt d’archives sont abattues. Quelques années plus tard, sa toiture est entièrement refaite. C’est alors que la demeure prend l’aspect que nous lui connaissons aujourd’hui, avec ce toit à la Mansart si caractéristique. A compter de 1948, le château accueille des colonies de vacances et des classes vertes. Plusieurs travaux sont menés, pas toujours heureux pour le site qui avait déjà été en partie amputé de ses dépendances en 1944. Dans les années 1980, Edith et Roland de Pange reprennent les lieux en main. Ils font classer le site au titre des Monuments Historiques, l’ouvrent à la visite et le font connaître dans toute la Lorraine. En 2022, ils créent l’Association pour la reconversion du château de Pange. Le château, bien que fermé à la visite en raison d’importants travaux, accueille alors plusieurs événements et manifestations culturelles tels que des lectures, des concerts et des veillées contées. Gageons que, d’ici peu, ce très beau site sera de nouveau ouvert à la visite. Les propriétaires, véritables érudits amoureux de leur domaine et de son histoire, vous raconteront alors les vies tumultueuses de leurs ancêtres. Ils vont parleront en effet de Pierre Thomas de Pange, anobli en 1626 par le Duc Charles IV pour « plus de trois cents ans de service rendus par sa famille à la Lorraine ». Ils vous conteront l’histoire de Louis de Pange, compagnon de Lafayette à Yorktown tué dans les guerres de Vendée, de son cadet, François, le politique admiré par Madame de Staël et du petit dernier, Jacques, qui deviendra chambellan de Napoléon et qui accueillera à ce titre l’impératrice Marie-Louise à Pange, en 1812. Ils vous parleront enfin du Comte Jean de Pange, acteur discret mais efficace de la construction européenne et de son neveu, lui aussi prénommé Jean, résistant célèbre et pilote d’avion dans l’escadrille Normandie-Niemen. Pange, en somme, à autant d’histoires à raconter que de trésors à dévoiler !
