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Des prothèses en bois pour sauver les dahuts des Vosges

Panneau indicateur de passage de dahut au sommet du Hohneck dans les Vosges (Crédits photo : Jihelpé)

Une fois n’est pas coutume, sortons des dépôts d’archives et quittons les vieilles pierres pour entrer aujourd’hui dans l’atelier d’un de nos plus célèbres sabotiers. Originaire du hameau de la Boudotte, dans les Hautes-Vosges, Jeannot Brocotte passe pour avoir chaussé, dans la seconde moitié du XIXème siècle toute la Vallée du Rabodeau. De l’élégant sabot de femme, fermé par une bride de cuir au lourd sabot du laboureur, cet artisan exceptionnel réalisa, au cours de sa vie, pas moins de 5 684 paires de sabots.

En 1884, il testa sur le Lac de Gérardmer les premiers sabots flotteurs. D’assez grandes dimensions, ces derniers ressemblaient à des coques de catamarans et devaient permettre à son utilisateur de marcher sur l’eau. Un temps pressenti pour équiper les troupes françaises, l’invention fut hélas abandonnée à mesure que se développaient les dirigeables.

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Représentation d’un dahut dans son habitat naturel, le flanc d’une montagne vosgienne (Crédits image : Philippe Semeria)

Mais c’est surtout à compter de 1908 que Jeannot Brocotte s’illustre dans le domaine de la saboterie (et non du sabotage). Alerté par la disparition des derniers dahuts, il décide d’aider ces animaux endémiques aux Hautes-Vosges en leurs confectionnant des petites pattes de bois. Car c’est bien connu, le dahut ayant les pattes de droite plus courtes que les pattes de gauche, il ne peut évoluer qu’en terrain pentu. En confectionnant des prothèses pour dahuts, Jeannot Brocotte a ainsi pu acclimater l’animal à la plaine. Et en effet, la Gazette de la Meuse relate avoir aperçu le dernier dahut dans la Woëvre, en 1917. L’introduction de la termite à tête rouge par les troupes américaines de Pershing aura raison, dès 1918, des prothèses de bois pour dahuts. Ces derniers ont vu leurs prothèses rongées par les termites. Ainsi que, probablement, par quelques pics-verts enragés. Le dahut, de ce fait, ne s’aperçoit plus guère. Mais nous devons saluer l’effort ingénieux de notre sabotier pour sauver les derniers spécimens de ce qui peut à juste titre être considéré comme un emblème lorrain !

N’hésitez pas à effectuer quelques recherches sur ce fameux sabotier ! Peut-être m’aviez-vous vu venir … avec mes gros sabots. En espérant, amis Lorrains, que cette histoire vous aura fait sourire ! Excellent 1er avril à toutes et à tous !

Rédigé par Kévin GOEURIOT

Historien de la Lorraine, écrivain et professeur d’histoire-géographie pour le Groupe BLE Lorraine.

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