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La Lorraine comme décor d’une pièce de théâtre

Crédits photo : Frédéric Fappani von Lothringen

C’est assez rare pour être souligné, mais la Lorraine se retrouve au cœur d’une récente pièce de théâtre comique écrite par Frédéric Fappani von Lothringen et Eric Coudert. Intitulée Mais tu ne pouvais pas le dire !, cette savoureuse et succulente création parue aux Editions de L’Harmattan se niche dans la charmante commune lorraine fictive de Kuhdorf, si caractéristique de nos terroirs. Par ailleurs président international d’une Organisation Non-Gouvernementale (ONG) centrée sur la jeunesse et implantée dans 23 pays à travers le monde, Frédéric Fappani von Lothringen nous dévoile ci-dessous les coulisses de la création de cette œuvre et les caractéristiques des personnages si attachants et virevoltants qu’elle met en scène.

BLE Lorraine : Pourquoi avoir décidé d’écrire une pièce de théâtre ?

Frédéric Fappani von Lothringen : « L’écriture est arrivée finalement très récemment dans ma vie, dans ce que je nommerai une deuxième partie de vie, plus mature et plus adulte. Je pense que c’est l’article dans Le Monde paru en 2009 sur mes analyses de la jeunesse qui a amplifié ce mouvement en moi.

En effet, depuis l’on m’a alors souvent sollicité pour des colloques, des interventions mais aussi des écrits. Je rédige depuis régulièrement des articles et même des livres, mais plutôt sur des questions de jeunesse, d’éducation et de psychologie. Depuis 2016, je fréquente beaucoup plus d’artistes et d’auteurs que par le passé. Mon mandat de président international d’ONG m’a fait côtoyer des activités culturelles, dont le théâtre, de plus en plus.

Le petit enfant élevé au théâtre ce soir et aux comiques français rêvait en moi de participer un peu à ce monde-là. J’ai toujours été fasciné par Louis de Funès, Bourvil ou Jean Lefevre et surtout Robert Lamoureux. Cet univers de la comédie m’a toujours émerveillé.

Je crois que le désir d’écrire était déjà un peu là et il a trouvé dans ce contexte de quoi naître ! Rester à l’accompagner. Ce qui n’est parfois pas simple. Avoir du désir est une chose, mais avoir le désir d’accompagner le désir est parfois un problème. Cela allait en fait, de soi, pour moi et c’était même assez puissant en moi. Le plus accessible pour moi et pour l’enfant en moi qui rêve d’aventures et de comédiens, c’était donc l’écriture d’une pièce de théâtre. »

BLE Lorraine : D’où vous est venue cette idée et pourquoi avoir choisi de prendre la Lorraine comme décor ?

FFVL : « D’abord parce que je n’ai jamais mis en avant mes racines lorraines publiquement et que j’ai alors décidé de les revendiquer. Cette affirmation personnelle s’est faite en même temps que je travaillais à l’ONU sur les peuples, les langues et les cultures autochtones depuis deux ans. J’ai réalisé que je parlais français, allemand et que je comprenais le Lothringer Platt. Je baigne dans un biculturalisme, presque trois pourrait-on dire. C’était en réalité plus important pour moi que je ne le croyais. Le tout a fait écho à une partie de mes racines.

Ma famille est partie de Lorraine en 1914 pour se réfugier à Arcachon, puis plus tard en Limousin, jusqu’à l’après Seconde Guerre mondiale. Un lorrain de l’exil, comme il y en a eu et il y en a beaucoup. Moins banal c’est le maintien chez moi d’un trilinguisme, mais je reconnais avoir beaucoup travaillé cette question.

En 2017, j’ai passé beaucoup plus de temps dans l’Est de la France et j’ai vraiment renoué avec les ambiances de villages. L’idée de cette pièce en Lorraine s’est alors encore plus concrétisée pour cette écriture. La folie ordinaire des gens et la comédie humaine à l’œuvre sont alors devenues pour moi une source de comédie possible. Quand j’ai évoqué cette idée à Eric Coudert, il a été emballé … ayant lui aussi vécu dans des villages une partie de sa vie, il avait envie de rajouter son grain de sel. Il y a tellement de choses dont on peut rire dans les villages ! »

BLE Lorraine : Comment s’est construit votre projet ?

FFVL : « Le projet n’est pas banal dans sa construction. Mais déjà il fallait arriver à démarrer l’écriture. Eric Coudert et moi-même sommes souvent surbookés de rendez-vous. Lui est producteur et animateur radio. Son activité à la télévision lui prend aussi pas mal de temps. Difficile pour lui de s’articuler avec moi, directeur d’un service de la fondation OPEJ (Œuvre de Protection des Enfants Juifs) de Rothschild et Président d’une ONG internationale. Finalement, nous nous sommes retrouvés chaque mardi matin de 8h à 10h pendant plusieurs mois. Nous nous sommes également envoyés beaucoup de mails et d’idées.

Nous avons également associé des lecteurs au projet sur les réseaux sociaux. Je tiens ainsi à les remercier. Audrey Gautier, Ty Lemeray et Raphaël Morgan ont fait office de conseils artistiques. Eloïse Gordien, Céline Allais, Christophe Cadiou et Michel Lamy ont quant à eux joué les rôles de correcteurs. Louis-José Temporal, Pierre-Yves Chiron, Guy Benloulou, Lisbeth Prevost, Andréas Richier, Christophe Martorano, David Cressely, Patricia Gautier, Frédéric Thomas, Virginie Heber-Suffrin, Gérard Mattera, Thomas Riboulet, Sandrine Gire, Kévin Giges, Vincent Biarneix et Caroline Revia ont enfin participé aux deux groupes de lecteurs.

Cette liste s’explique par la construction du projet. Une fois que nous avons eu une pièce écrite après plusieurs mois, nous avons alors fait une lecture avec des acteurs pour tester le temps, le rythme et la cohérence. Puis une fois la pièce un peu mieux stabilisée dans son écriture, nous avons alors testé la comédie auprès d’un premier groupe de dix lecteurs. Ils nous ont par la suite adressé des remarques et des rapports écrits sur notre livre. Nous sommes alors repartis dans nos mardis d’écriture en prenant en compte ou pas les éléments des retours. Après un mois, nous avons renouvelé l’opération auprès de dix autres personnes, le second groupe de lecteurs. Ils nous ont, eux aussi, par la suite adresser leurs remarques. Nous nous sommes alors rendus compte que la pièce était sortable en reprenant quelques éléments de narration. S’en est suivi un travail de correction orthographique avec trois personnes.

Le résultat final est donc le fruit d’une immense coopération entre des gens de divers horizons et de divers intérêts. L’idée était aussi pour nous d’échanger avec les gens, avec l’âme des villages, avec l’âme de la Lorraine et de la France ! Finalement, après quelques mois d’attente, les éditions L’Harmattan ont accepté de nous signer et de nous publier. »

BLE Lorraine : L’histoire et les personnages s’inspirent-ils de la réalité ?

FFVL : « Oui, il y a une part de vrai dans certains personnages, comme par exemple, pour le Maire. L’écriture de ce personnage est composée à la fois d’un maire réel que nous avons rencontré dans l’Est qui ressemble un peu au personnage de Maire joué par Robert Lamoureux dans L’amour foot et qui reprend aussi certains de mes travers de personnalité. D’ailleurs, c’est pour cela qu’il porte mon nom « von Lothringen ». Ce qui n’est pas en usage habituellement. En l’occurrence, mon nom signifiant « de Lorraine », cela nous permettait aussi d’enraciner plus encore notre histoire dans le pays.

Il y a aussi une part d’imaginaire avec des personnages inventés de toute pièce comme l’artiste « Klein-Klein » ou des personnages inspirés d’autres. Vous retrouverez ainsi des personnages de Robert Lamoureux auxquels nous avons donné une seconde vie, à l’image de la mère Crouzy, personnage de la Septième Compagnie. Il y a aussi beaucoup de clins d’œil au réel et à nos activités. Par exemple, on s’est amusé à parler de l’inventeur de la « Piconwurst » ou « saucisse au Picon », le boucher Sébastien Magard. Il n’y a quand même pas plus populaire, lorrain et contemporain que ça !

On a fait par ailleurs passer quelques personnalités corses connues à une cérémonie de village de Lorraine. On trouvait amusant de parler d’un peuple pour qui langue, territoire et questions politiques résonnent beaucoup. Cela faisait bien écho à la Lorraine … même si ces questions sont loin d’être aussi conscientisées ici. J’ai d’ailleurs rencontré certains de ces Corses dans le cadre de mon ONG et de travaux sur les peuples autochtones. Cela me faisait par conséquent plaisir de les citer. Nous avons fait de même avec des membres de la communauté tamoule et une délégation de militants régionalistes lorrains … avec là-aussi des gens qui existent vraiment dans la réalité. Cela dit, les personnages principaux sont pour l’essentiel inventés. Et heureusement d’une certaine manière car cette comédie va à cent à l’heure ! »

BLE Lorraine : Avez-vous des projets de traduction en langue régionale de Lorraine ?

FFVL : « C’est une belle question et la réponse est oui. En tout cas j’en ai le désir. Je cherche déjà à la traduire en Platt et en Vosgien. Ça serait pas mal ! Pour le moment, quelques contacts sont pris. Nous démarrons juste. Je ferais une version en allemand. Ça c’est sûr ! On peut d’ailleurs me contacter par mail pour me faire des propositions pour travailler avec moi sur des traductions en langue régionale de Lorraine. C’est un chantier qui s’ouvre, une nouvelle aventure … à suivre donc ! Merci à BLE lorraine de nous avoir donné la possibilité de parler de notre pièce. Elle est simple et rapide à lire et vous passez un bon moment. Je souhaite donc à tous les lecteurs de BLE Lorraine … une bonne rigolade quand ils liront notre pièce. »

Rédigé par Rédaction BLE Lorraine

La Rédaction du Groupe BLE Lorraine, premier média et think tank indépendant de Lorraine.

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