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Programme Grand Cœur : il faut sauver les fortifications de Nancy !

Crédits photo : André Vaxelaire

Dans le cadre de l’aménagement du secteur Sud du nouveau quartier Nancy Grand Cœur, les fouilles réalisées par l’INRAP (Institut National de Recherches Archéologiques Préventives) ont révélé les restes du Bastion de Saurupt. Le projet d’immeuble qui doit se construire à l’emplacement même de ces vestiges va entraîner leur destruction définitive si rien n’est fait.  

Selon les travaux des historiens de référence, on pensait qu’il ne restait absolument rien de l’ensemble fortifié créé sous Charles III, puis abattu et reconstruit par les Français, avant d’être définitivement détruit au moment du Traité de Ryswick qui entérina l’annexion de la Lorraine à la France. Or, cette vision d’une fortification qui aurait totalement disparu a été contestée par la mise à jour de très nombreux vestiges, conséquents et parfois de grande qualité, lors de campagnes de fouilles menées notamment lors de l’extension du Musée des Beaux-arts ou plus récemment lors de la construction du parking République et du Palais des Congrès. Fort heureusement, des éléments significatifs ont pu être intégrés au Musée des Beaux-arts en modifiant le projet originellement prévu. Ils donnent une dimension beaucoup plus forte à cet équipement culturel phare de Nancy. Mais, malheureusement, il n’en a pas été de même lors de la réalisation du parking République qui aurait pu sans doute intégrer un pan significatif de l’ouvrage fortifié. A la vue des restes mis au jour du Bastion de Saurupt, André Vaxélaire, Professeur émérite de l’Ecole d’Architecture de Nancy, ne comprend toujours pas que l’urbaniste du secteur n’ait pas anticipé ce qui pouvait être découvert, afin d’intégrer d’éventuels vestiges dans les projets à venir. En effet, un projet urbain doit toujours se donner la possibilité d’évoluer dans le temps pour faire face à tout aléa conjoncturel ou intégrer de nouvelles réalités.

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Un nouveau parc urbain pourrait mettre en valeur dans un environnement paysager soigné les fortifications promises à la destruction (Crédits photo : André Vaxelaire)

M. Vaxelaire a demandé à la Ville de Nancy de procéder à une modification substantielle du projet d’aménagement du quartier pour valoriser ce passé. « Dans mon esprit il ne s’agit, ni de conserver quelques morceaux de ces vestiges et de les intégrer à la construction nouvelle projetée avec la mise en place d’un panonceau explicatif, ni de transporter certains éléments par exemple dans un parc hors de tout contexte, mais bel et bien d’envisager une modification de cette partie du projet d’aménagement » prévient-il. « Il y a l’opportunité, sur l’ensemble du linéaire, de dévoiler une partie importante de vestiges encore enfouis dans le sol et de restituer l’architecture et la topographie des anciens fossés », poursuit-il. André Vaxelaire propose donc de « créer un parc des fortifications qui prendrait place au cœur du vaste îlot constitué par les Rues Charles III, des Quatre Eglises, du Général Leclerc et du Ghetto de Varsovie ». Ce parc pourrait être prolongé par celui de la congrégation des sœurs Saint-Charles, prête à céder le terrain à la Ville. Tout un flanc des fortifications pourrait alors être mis en valeur dans un environnement paysager qui mêlerait des parties en très bon état de conservation à des pans de murs couchés suite au travail de sape des Français. André Vaxelaire y verrait bien également un « parcours didactique », ainsi qu’un « petit édifice contemporain abritant une exposition permanente sur la ville de Charles III et son enceinte fortifiée qui permettrait ensuite aux visiteurs de mieux apprécier les vestiges in situ ». Il faut que la Ville de Nancy s’accorde d’urgence avec l’investisseur Linkcity Nord-Est, qui s’est vu octroyer un permis de construire le 30 juin dernier sur le terrain où ont été exhumés les vestiges du Bastion de Saurupt, pour lui proposer une autre parcelle sur laquelle il pourra réaliser son programme immobilier.

Au-delà de l’intérêt patrimonial et touristique, ce parc présenterait bien évidemment une grande utilité et constituerait un lieu d’agrément pour les habitants du quartier. Il renforcerait la biodiversité urbaine dans ce secteur. De plus, selon le Professeur Vaxelaire, ce parc pourrait être aménagé en partie sous la forme de bassins de rétention accueillant les eaux pluviales en cas de phénomènes météorologiques exceptionnels, ce qui soulagerait notamment le quartier de la Commanderie. « Appuyés sur la topographie des anciens fossés des fortifications, ces aménagements pourraient être envisagés comme au Parc de la Seille à Metz, qui peut ainsi servir entre autres de réceptacle partiel à une montée du niveau de la rivière », affirme-t-il. Avant de continuer : « la mise en valeur d’un linéaire significatif de l’ancienne enceinte fortifiée ne peut être envisagée raisonnablement à Nancy qu’en deux endroits : tout d’abord le long de la terrasse de la Pépinière jusqu’au Bastion de Vaudémont et dans le secteur du Bastion de Saurupt. Ce dernier offre donc une chance unique qui ne se représentera pas. La responsabilité historique du maire de Nancy, d’entreprendre ou non un tel projet de préservation et de valorisation, est engagée ».

André Vaxelaire sait combien la création de la Ville Neuve a été décisive dans l’histoire de Nancy. « Ces restes constituent les seuls vestiges physiques de l’enceinte fortifiée de Charles III qui pourraient être révélés et valorisés, et ce, d’autant plus si on les intègre à terme avec le parc de la congrégation des sœurs Saint-Charles », affirme le professeur. Nul doute qu’il s’agit ici d’une opportunité historique unique puisque partout sur le pourtour de la Ville Neuve tout autre reste des fortifications a été définitivement détruit sous les bâtiments. L’exposition Renaissance 2013 a montré le caractère innovant à l’échelle des villes françaises et européennes de la cité ducale. 

Il faut bien prendre conscience que ces vestiges sont les uniques témoignages en élévation de la création d’une nouvelle enceinte fortifiée destinée à protéger la Ville Neuve. Ces fortifications furent élevées avant même la mise en place du carroyage orthogonal des nouvelles rues.

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Rédigé par Thomas RIBOULET

Président-fondateur du Groupe BLE Lorraine et Rédacteur en Chef de BLE Lorraine.

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