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Pourquoi la Moselle est-elle plus touchée par le Covid-19 en Lorraine ?

Covid-19

Avec près de 640 décès à l’hôpital, la Moselle paye un lourd tribut dans la crise sanitaire déclenchée par la pandémie de coronavirus. Elle constitue à ce titre et selon ce critère le territoire lorrain le plus touché par le Covid-19 avec des chiffres proches des deux départements alsaciens. Si certains pensent y déceler une relation de cause à effet à grands renforts de fake news, d’interprétation foireuse et d’idéologie nauséabonde liés à leur méconnaissance totale de la réalité de nos territoires, il convient au contraire de mener une analyse plus approfondie pour comprendre le phénomène.

Tout a commencé dans l’Est de la France par le cluster de Mulhouse, dans le Haut-Rhin, en raison d’un rassemblement évangélique. Les participants de ce dernier, venus de toute la France et même de l’étranger, ont ensuite essaimé le virus en de nombreux endroits. Ce dernier s’est alors propagé dans toute l’Alsace, avant de gagner la Moselle et les Vosges notamment, puis le reste de la Lorraine. L’afflux de malades a d’ailleurs nécessité de transférer des patients depuis Nancy et Metz par le rail, la route ou les airs dans l’Ouest de la France et surtout en Allemagne, au Luxembourg et même en Autriche, afin de libérer des places dans les services de réanimation submergés par la vague virale. Nous ne pouvons que remercier nos amis et voisins par la solidarité qu’ils nous ont exprimés au cours des dernières semaines, le gouvernement allemand annonçant même que les soins de santé des malades lorrains seraient intégralement pris en charge.

Le nombre de cas de Covid-19 ne s’explique pas de la même manière en Alsace qu’en Moselle. Les liaisons et les grands axes de circulation et passage suivent en effet une logique Nord-Sud dans l’Est de la France, matérialisés notamment par le Sillon Lorrain et la Plaine d’Alsace. La Moselle n’est connectée au Bas-Rhin qu’à ses extrémités Est et Sud-Est principalement par l’Autoroute A4 via le franchissement du Col de Saverne et la Route Départementale 662 aux confins du Bitcherland. C’est dire les liens ténus. Non, au contraire, le nombre de cas très élevé en Moselle s’explique par différents facteurs. Il s’agit déjà d’un département millionnaire en termes d’habitants. C’est par conséquent mathématiquement plus difficile pour des territoires comme la Meuse ou les Vosges d’avoir plus de cas Covid-19 que la Moselle. Il vaut donc mieux comparer la proportion que le nombre. A savoir que, comme mentionné précédemment, au 29 avril, la Moselle compte près de 640 décès à l’hôpital pour plus d’un million d’habitant, la Meuse 83 pour environ 190 000 habitants et les Vosges 231 pour 361 000 habitants. Comparée et ramenée à leur population respective, la proportion de décès liés au Covid-19 est donc sensiblement la même pour ces départements.

Par ailleurs, on constate de nombreux décès et infections liés au coronavirus en Moselle-Est, c’est-à-dire dans l’ancien Bassin Houiller lorrain, dans les secteurs de Sarreguemines et de Forbach notamment. Pourquoi ? Tout simplement par qu’il s’agit d’une population vieillissante avec un nombre encore élevé d’anciens mineurs considérés comme à risque car souffrant déjà de nombreuses maladies respiratoires, comme par exemple la silicose, mais aussi de cancers des poumons. Rien qu’à l’Hôpital Robert Pax de Sarreguemines, environ 80 patients sont ainsi décédés du Covid-19. Rappelons que la dernière mine de charbon qui a fermé ses portes est celle de La Houve, dont l’exploitation s’est arrêtée en 2004. Compte-tenu des conditions de départ à la retraite et de pré-retraite mises en place dans le cadre du Pacte Charbonnier, la grande majorité de cette population a aujourd’hui entre 60 et 80 ans. Ces anciens mineurs lorrains garnissent désormais les salles d’attente des pneumologues jusqu’à Metz, faute de spécialistes suffisants en Moselle-Est. Ils constituent une cible de choix pour le coronavirus. Ajoutez à cela les conditions de précarité de ce bassin de vie, le plus pauvre de Lorraine avec celui de Saint-Dié-des-Vosges, et vous obtenez une véritable poudrière sanitaire. Depuis que le virus y est arrivé, cette population qui était déjà fragilisée tombe comme des dominos. Pour rappel, les anciens mineurs essayent également de faire reconnaître le préjudice d’anxiété dû à l’exposition à tout un tas de produits nocifs qui seraient aussi à l’origine d’une explosion du nombre de cancers. Des milliers de personnes sont concernées.

A noter enfin que dans le cadre du confinement et du déconfinement, il nous apparaît plus pertinent et pragmatique de considérer et de s’appuyer sur les territoires de santé plutôt que les départements. En effet, la crise sanitaire est gérée au niveau des Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT), à l’image de celui de Lorraine Nord qui s’articule autour du CHR de Metz-Thionville et qui inclue les patients de Briey et de Mont-Saint-Martin situés dans le Nord de la Meurthe-et-Moselle, ou encore de celui de Lorraine Sud constitué autour du CHRU de Nancy qui prend en charge les patients des Vosges.

Rédigé par Rédaction BLE Lorraine

La Rédaction du Groupe BLE Lorraine, premier média et think tank indépendant de Lorraine.

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