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Des grandes épidémies passées par la Lorraine et autour

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Médecin de peste (Crédits photo : CoolWallpapers)

Si l’historien a le devoir de ressusciter le passé d’une manière impartiale et la plus véridique possible, il a peut-être aussi le devoir d’exhumer, de ce même passé, quelques éléments destinés à éclairer le présent. Exemple avec les épidémies passées par la Lorraine.

En 1347, après six siècles d’absence, la peste fait à nouveau son apparition en Occident. Arrivée d’Italie, la maladie fait des ravages. Les personnes contaminées présentent des bubons noirâtres sous les aisselles et dans l’aine. Ils meurent en deux jours. Trois tout au plus. On court chez les prêtres pour se confesser et chez les notaires pour faire rédiger son testament. A Givry, en Bourgogne, on procède à 630 inhumations entre les seuls mois de juin et de septembre 1348 ! On cherche des boucs émissaires. On peint, sur les murs de nos églises, des danses macabres et on multiplie les processions de flagellants. On accuse alors les Juifs. On regarde mourir …

En 1519, à Strasbourg, les gens se mettent à danser subitement, probablement atteints du mal de Saint-Guy, une contamination liée à l’ergot de seigle. Les autorités de la ville ne savent pas comment réagir. Les danseurs finissent par être emmenés en pèlerinage à Saverne, où on les précipite dans un ravin. Problème réglé.

En 1585, Châtenois, dans les Vosges, est décimé par la peste. En l’espace de dix ans, la population du bourg passe de 900 à 350 habitants. A la même époque, à Metz, les lépreux, reconnaissables à leurs crécelles et à leurs bandages purulents sont tenus à l’écart dans les ladreries situées à l’Est de la ville pour ne pas que les vents dominants ne rabattent les miasmes sur la cité. Ils survivent alors aux Bordes, près de Vallières, ou à la Ferme Saint-Ladre, près d’Augny.

En 1630, dans le Toulois, la peste, toujours, ravage le village de Bagneux, qui reste désert pendant plusieurs années. Aingeray, autre localité située non loin de là, serait à jamais ruinée. Raon-l’Etape accuse 344 morts en l’espace de deux mois, en 1635. Un peu partout, on élève des chapelles dédiées à Saint-Roch et à Saint-Sébastien, personnages traditionnellement invoqués contre les épidémies.

En 1832, le choléra morbus sévit en Lorraine. A Rosières-aux-Salines, le conseil municipal décide d’affecter la somme de 500 Francs, initialement destinée pour les festivités du 1er mai, à la location d’une salle dans laquelle seront confinés les malades.

Une nouvelle épidémie de choléra éclate en 1854. Le petit village de Bouillonville, qui comptait alors 300 habitants, accuse 29 morts en l’espace d’un an. A l’échelle de la France, cette nouvelle épidémie fait 143 000 morts !

Je ne note pas cela pour faire peur. Encore moins pour faire pleurer. Mais juste pour remettre, modestement, quelques petites choses en perspective. Ces maladies, couplées aux mauvaises récoltes, aux disettes et aux famines, aux guerres et aux destructions, ont terriblement éprouvé nos ancêtres. Pourtant, nous sommes là, nous ! Nous sommes leurs descendants. Leurs héritiers. Et nos héritiers seront là, encore, pour témoigner. Et pour dire que si la vie est pareille à un jeu de tarot, on tire les cartes, mais ce n’est pas nous qui décidons des dessins qui y figurent.

Rédigé par Kévin GOEURIOT

Historien de la Lorraine, écrivain et professeur d’histoire-géographie pour le Groupe BLE Lorraine.

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